Lectures pour tous : Robert Littell
« Ce dont la mère Russie a besoin pour retrouver la grandeur qui était la sienne du temps de Joseph Staline, dit-il enfin comme s’il livrait là une information capitale, c’est un nombre toujours croissant de funérailles. » Robert Littell, La peste sur vos deux familles, 2022, traduit de l’anglais par Pierre Ménard, Flammarion, 2022.
Paris, par Charles Marville [Parigramme]
La place Saint-André-des-Arts, telle que photographiée vers 1865 par Charles Marville.
Le cinéma du même nom, fondé en 1971 par Roger Diamantis,
se trouve un peu plus à gauche.
« All Alone » à Grenoble, en mars 1978
Les établissements Tompkins Square de San Francisco
[avec un coup de pouce de l'Ina, sans doute dépositaire des droits]
viennent de publier ce printemps un concert enregistré en solo par Mal Waldron
le 23 mars 1978 à la Maison de la Culture de Grenoble,
et resté inédit jusqu'à ce jour.
Cela prend la forme d'un double CD très classe, dont le livret contient notamment
des entretiens avec Ran Blake et Matthew Shipp. En vente partout, c'est sûr.
Voici une version royale de All Alone, un sommet du répertoire de Mal. On vous gâte.
Une goutte de bon sens dans un monde de gratte-culs
« La Cour de cassation confirme le refus d’extrader dix militants italiens d’extrême gauche.
« Ils sont installés en France depuis plusieurs décennies. La Cour de cassation a confirmé, mardi 28 mars, le refus d’extrader dix anciens militants italiens d’extrême gauche, réclamés par Rome pour des faits qualifiés de terrorisme commis lors des années de plomb, a-t-elle annoncé dans un communiqué.
« La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire valide ainsi définitivement la décision de la cour d’appel de Paris, qui s’était opposée en juin 2022 à la remise à l’Italie de ces deux femmes et huit hommes. La cour d’appel avait appuyé sa décision sur le respect du droit à la vie privée et familiale ainsi que sur le droit à un procès équitable, prévus par les articles 8 et 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme. »
[Pour les détails, voir vos canards quotidiens.]
Marina Petrella, aujourd'hui
Lectures pour tous : Beppe Fenoglio
« Giolitti est vieux. Il est même plus vieux que toi. Cette guerre se fera. L’Italie fera la guerre à l’Autriche. Or l’Italie je la connais à peine, et l’Autriche je ne la connais pas du tout. Je ne veux donc pas la faire. S’ils sont fous, moi je ne le suis pas. Pour ne pas être mêlé à cette folie, je suis prêt à tout, y compris à passer pour fou. [... ] Le village ? Mis à part le fait que je me fous de ce que pourra dire le village, ceux qui seront bientôt crevés, comme les bons vivants et leurs fils ou petits-fils, présents et à venir, mis à part cela, je préfère que le village parle de moi comme d’un fou plutôt que comme d’un type qui est en train de nourrir les vers en Vénétie. » Beppe Fenoglio, « Un Fenoglio pendant la Grande Guerre », in La permission, 1961, traduit de l’italien par Alain Sarrabayrouse, Ivréa 1994, Cambourakis 2022.
Le réveil du policier [Une chanson qui vient à point...]
... mais ça pourrait être n'importe où n'importe quand.
[voix : Fanchon Daemers (corrigez-moi si je me trompe)]
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« Adieu au langage » (2014) réédition 2023 hors commerce
Maurice Darmon de 202 éditions nous informe :
« Suite à plusieurs demandes, nous rééditons notre première publication de décembre 2014 à cinquante exemplaires hors commerce, en vente exclusive à 10 € franco de port par correspondance, à l’intention de nos lecteurs qui n’ont fait notre connaissance qu’ensuite. À ce jour, il en reste trente-cinq. »
Ce qu'en dit l'éditeur. « Le propos est simple », écrit Jean-Luc Godard dans son résumé en dix lignes. Quatre mots en forme de provocation pour qui les lit après avoir vu le film, ou pour qui se sera fié aux plaintes des chroniqueurs de presse clairs et distincts, criant à la confusion mentale, la prétention alambiquée, les propos creux, quand ils ne sont pas tombés dans la migraine ophtalmique.
Lectures pour tous : Robert Desnos
Si c’est toi le peigne cul
Peigne, peigne en silence
Accumule tes écus
Emplis-toi la panse
Si c’est toi le peigne cul
Recouds tes galons de laine
Caporal ou premier jus
Tu as mauvaise haleine
Mais c’est toi le peigne cul
En dolman rouge ou en soutane
Ventru cocu poilu
Portant képi ou bonnet d’âne
Mais c’est bien toi le peigne cul
Habillant les encaisseurs à ton image
Et les juges en bonnet pointu
Et ton peigne pour tout bagage
Robert Desnos, 9/6/36, Poèmes de minuit inédits 1936-1940, Seghers 2023.
Ten Years After, 1969
Alvin Lee (guitare), Leo Lyons (basse), Ric Lee (batterie), Chick Churchill (claviers)
I'm going home, août 1969, Woodstock (NY). Alvin Lee a vingt-cinq ans.
"Puls Art" [Trio Orbit]
Stephan Oliva (piano), Stéphane Boisseau (contrebasse), Tom Rainey (batterie)
Extrait de Orbit In-Visibility, Yolk 2023
Lectures pour tous : J.M.G. Le Clézio
« La forêt est un mur vivant, quand tu le traverses tu n’en reviens jamais, un monde de nuit, de pluie, d’animaux furtifs, de jaguars et de pumas, de tapirs et de cerfs, un monde d’insectes, garrapatas, tiques, chinches, punaises, coloradillas, aoûtats, moustiques et moucherons, le monde des tama echarra, des vipères fer-de-lance, rapides comme des anguilles, les inkas, les timides vampires qui viennent mordiller le coude des enfants endormis. Les tamanduas, les fourmiliers à deux doigts, somnolents, les yarrés, les singes araignées, insolents, les kotutus, les singes hurleurs qui rugissent à la tombée de la nuit, c’est ce monde qui ne te relâche plus quand il te tient, ce monde qui ne te libère jamais. Et tu dois vivre dans son ombre, comme si rien de ce que tu as connu, rien de ce qui t’a fait ne pouvait lui survivre. » J.M.G. Le Clézio, Avers. Des nouvelles des indésirables, 2023, Gallimard.
Sur quelle planète vivent les publicitaires ?
La belle traduction, par Michel Mohrt, du roman de Robert Penn Warren (Night Rider, 1939) a été rééditée il y a un an dans la collection L'indéFINIE (sic) des éditions Séguier. C'était une bonne nouvelle, le livre étant épuisé depuis longtemps. L'annonce de sa sortie en poche en février 2023 est donc une très bonne nouvelle. Un jeune retraité peut s'offrir ce chef-d’œuvre des lettres américaines pour 10 € au lieu de 22 €. On le savait déjà: contrairement au prix du carburant et des carottes râpées, celui du livre n'augmente pas. Cela dit, le flyer publicitaire - ça s'appelle comme ça - que 10/18 [groupe Editis] a mis en circulation n'échappe pas à ma perplexitude. Y a-t-il vraiment des "professionnels" de l'édition pour confondre le magazine cuturel dont Lionel Rotcage créa la version française en 1988, et le fameux groupe de rock anglais de Mick Jagger ? On me dira que ce n'est pas si grave. Vous êtes sûr ?
Bonga – « Paxi ni ngongo »
Extrait de l'album Angola 72/74 [réédité en 1997]
[Plein de mercis à l'ami Billy]
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Bonga
Lectures pour TOUS : Kenzaburo Oe [1935-2023]
« Mais des sanglots jaillissaient sans fin de mes lèvres couvertes de boue et se répercutaient dans l’air sombre et humide, révélant ma cachette au forgeron et à son acolyte qu se démenaient bien plus bas, à ma recherche, avec des cris, ainsi qu’aux villageois excités par un désir de meurtre. Pour contenir mes sanglots, je haletais en ouvrant la bouche, comme un chien. Je scrutai la nuit sombre et me préparai aux attaques des villageois en saisissant une pierre dans mon poing glacé. Mais, au début, je ne savais comment faire pour échapper à leur férocité, traverser la forêt en pleine nuit et éviter leurs brutalités. Je ne savais même pas s’il me restait encore la force de courir. J’étais épuisé, fou de rage, en larmes. Je n’étais plus qu’un enfant qui tremblait de froid et de faim. Soudain, le vent s’est levé, apportant le bruit des pas des villaeois qui venaient tout près. Je me suis levé, en serrant les dents, et je me suis mis à courir dans les hautes herbes, entre les arbres, encore plus sombres. » Kenzaburo Oe, Arrachez les bourgeons, tirez sur les enfants (1958), traduit du japonais par Ryoji Nakamura et René de Ceccatty, Gallimard, « L’imaginaire », 1996.