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10 janvier 2010

Un livre de Chessex sur Sade (auto)censuré en Suisse

Lu ceci :

Jacques Chessex, mort le 9 octobre 2009, à 75 ans, n'aurait sans doute pas imaginé mésaventure plus à son goût que celle qui accompagne, en Suisse,  la sortie de son ultime roman, Le Dernier Crâne de M. de Sade (Grasset), [...]  vendu sous cellophane avec un macaron : « Réservé aux adultes ». Le livre, texte provocateur et vigoureux qui contient des « scènes sales », dixit Jacques Chessex lui-même, raconte les six derniers mois de Donatien Alphonse François, marquis de Sade – alors âgé de 74 ans et enfermé depuis onze ans avec les fous à l'hospice de Charenton –, sa fureur de transgresser et de blasphémer jusqu'à sa mort, en décembre 1814, ses frénésies sexuelles et ses ébats scatophiles avec une jeune fille de quinze ans et demi. Suit le récit de ce qu'il advint du crâne du Divin Marquis, récupéré en 1818 dans sa tombe par son propre médecin.

C'est devant le caractère particulièrement sulfureux des chapitres VII, VIII et IX, qui mettent en scène le vieillard libertin et la jeune fille, apprentie repasseuse à l'hospice de Charenton, que la maison vaudoise Diffulivre, chargée de commercialiser en Suisse les productions des éditions Grasset, a pris peur, choisissant sur les conseils de juristes d'appliquer le « principe de précaution » aux 10 000 exemplaires suisses du roman.

Au nom de la lutte contre la pornographie dure, l'article 197 du code pénal helvétique énonce que celui qui aura fabriqué ou diffusé auprès des moins de 16 ans des « objets et des représentations (...) ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence » pourra être condamné à une peine maximale de prison de trois ans et à une amende, et ses productions confisquées. En quoi le roman de Jacques Chessex était-il concerné, puisque le même article du code pénal indique que les oeuvres qui ont « une valeur culturelle ou scientifique digne de protection » ne peuvent être considérées comme pornographiques ?

« Nous avons estimé que nous risquions quelque chose. Il suffit qu'une personne dépose une plainte pour qu'un diffuseur ou même un libraire puisse être condamné, explique un responsable de Diffulivre. Je ne m'attendais pas à ce que Chessex sorte un roman comme celui-là, en mentionnant en particulier l'âge de la jeune fille », ajoute-t-il. Il rappelle ainsi que, en 2000, son patron avait écopé d'une peine de prison avec sursis et d'une amende personnelle pour avoir commercialisé une bande dessinée où l'on voyait les ébats d'une jeune fille et d'un gorille.

D'autres précédents ont été recensés ces dernières années. En septembre 2008, une descente de police avait eu lieu dans la librairie Payot de La Chaux-de-fonds (canton de Neuchâtel). Se fondant cette fois-ci sur une loi cantonale de 2006 contre la prostitution et la pornographie, les forces de l'ordre avaient estimé que cinq livres érotiques, mais également deux livres d'art, l'un sur Modigliani et l'autre contenant les carnets érotiques de Picasso, ne devaient pas tomber entre toutes les mains. Le gérant de la librairie était entendu par la police et on lui suggérait de déplacer le « matériel » en question, voire de le mettre sous cellophane. L'affaire avait ensuite été transmise au parquet, se soldant finalement par un non-lieu.  [d’après une correspondance d’Agathe Duparc, parue dans Le Monde du 9 janvier] 


jacques_chessex

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