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18 février 2012

Guerre d'Algérie : Rééditions Minuit 3

« Messieurs, il ne fait pas de doute que dans cette guerre où nous avons tort, l’intention de servir l’équité, la justice, le bon droit, constitue une aide indirecte à la rebellion.

Ce n’est pas moi que ça concerne, c’est cette guerre.

Cette guerre est injuste dans son pricipe et dans ses buts. Notre gouvenement a mis cinq ans à prononcer le mot "autodétermination" qui la condamne, justement, dans son principe et dans ses buts. Allons-nous continuer longtemps encore de tuer les Algériens avant de faire passer dans la réalité des faits cette autodétermination mentionnée jusqu’à ces tout derniers jours de façon si parfaitement incantatoire ?

Cette guerre est injuste dans ses méthodes. Le massacre des innocents a pris du volume et de l’ampleur au point de mériter un nouveau nom. Il a nom: génocide. Et, par la voie des exécutions sommaires, des bombardements de mechtas et par l’implantation des camps de la mort lente, nous le commettons chaque jour en Algérie.

Cette guerre est injuste, elle est déshonorante et désonorée par la systématisation de la torture.

J’ai écrit sur la torture. On me l’a reproché. On me le reprochera. Du moins, messieurs, avais-je écrit jusqu’à présent sur documents. Depuis, j’ai vu. J’ai vu arriver à Fresnes, dans la prison où je suis, des hommes, des Algériens qui sortaient des mains des harkis ou de la DST, le corps marbré par les coups, mâchuré, bleu par plaques, les os cassés. J’ai vu, entre les doigts d’un gosse dont les lèvres tremblaient quand il essayait de parler, les plaies toutes fraîches, les plaies hideuses des électrodes. Plaies inertes, la peau partie, les chairs à vif…

Je dis, messieurs, que cette guerre et condamnée, de quelque point de vue qu’on la prenne. D’un point de vue de gauche, qui est le mien, pour les raisons que j’ai dites. D’un point de vue de droite, parce que c’est une guerre perdue. D’ores et déjà perdue. »

[Georges Arnaud s’adressant à ses juges, lettre publiée par France-Observateur, 23/6/1960.]

minuit delbo

Le mot de Minuit :

Il s'agit de correspondances publiées, depuis 1958 pour la plupart, à propos de faits ou d"articles concernant la guerre d’Algérie.

« Alors qu’auparavant, écrit Charlotte Delbo qui a composé ce recueil, l’indignation explosait en manifestations et en actions collectives..., elle n’a plus aujourd’hui le moyen de s’exprimer... Il n’y a plus de vie politique... Privé d’autres moyens d’agir on écrit des lettres. » À propos de La Question, du Manifeste des 121, de Francis Jeanson, de Georges Arnaud… entre autres sujets.

Parmi les textes rassemblés dans Les Belles Lettres certains n’avaient jamais été publiés dans leur intégralité. Quelques-uns auraient mérité une diffusion plus large que celle qui leur fut accordée. Ainsi, par exemple, la lettre adressée par dom Robert Gillet, bénédictin, à Laurent Schwartz après ses démêlés avec le ministre des armées: « J’ai toujours pensé que Dieu avait de l’imagination et de l’humour. Il est certainement très content de vous... »

D’autres messages — comme les derniers mots des exécutés de Montluc ou de la Santé — sont tragiques et graves, peu connus eux non plus [...] ces Belles Lettres, pour la plupart, valent d’être lues et relues.

A.J, Le Monde, 9-10 avril 1961

[Réédité en février 2012 par Minuit, à l'occasion du 50e anniversaire de la fin de la guerre de libération de l'Algérie.]

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