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le vieux monde qui n'en finit pas
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2 août 2014

Lectures pour tous : Louise Michel, Henri Gougaud

C’est l’été. Les vacanciers, ces feignants, devraient en profiter pour revisiter l’histoire de la Commune de Paris. Il leur est ainsi recommandé de lire à leurs enfants la vie de Louise Michel, dont l’excellent Gougaud vient de faire un conte noir, exaltant et cruel.

[Extrait. La maison d’arrêt d’Auberive (Haute-Marne), hiver 1872. Quelques dizaines de communardes attendent d’être expédiées en relégation dans la lointaine Nouvelle-Calédonie.]

« Elles se sont connues autrefois, quelques-unes furent amies dans une autre vie, si lointaine. Le printemps rouge, il y a six mois, guère plus. Une éternité. Elles tentent de se réchauffer, elles parlent des morts, des vivants, se donnent de vieilles nouvelles. Aucune ne se plaint de ce qu’elles ont vécu. [...] L’une d’entre elles, la plus vieille, cheveux argentés, chignon bas, allure de riche bourgeoise, un rien de malice dans l’œil, semble ne connaître personne. Elle paraît si peu communarde que l’on risque quelques questions plus amicales qu’indiscrètes. Elle répond volontiers que place Saint-Sulpice, son cher quartier depuis toujours, il y avait aux grands jours de mai une barricade si basse qu’elle ne servait à presque rien. Les hommes qui la défendaient tombaient sous le feu versaillais comme pantins au tir forain. Voyant cela, de sa fenêtre, elle s’en était si fort émue qu’elle n’avait pas pu s’empêcher de descendre parmi ces gens, bien qu’elle ne fût pas de leur bord, et de leur conseiller (ils n’y avaient pas pensé) de hausser le tas de pavés. Elle connaissait, rue des Canettes, une boutique de Jésus et de saints sculptés dans le marbre, de haute taille et d’air benoît. Elle avait trouvé judicieux de les dresser en sentinelles face à la mitraille ennemie. Après quoi, sans plus de souci, elle était retournée chez elle. On l’avait arrêtée, à quelques jours de là, gantée de blanc, vêtue de bleu, prête à sortir faire ses courses. Ses juges s’étaient indignés de son effrayante impiété. Elle avait répondu aux lorgnons ébahis: "Qu’ai-je fait de si surprenant ? Ces statues-là étaient en pierre, ceux qui mouraient étaient de chair." »

Henri Gougaud, Le roman de Louise, Albin Michel 2014

louise michel

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