Au rayon restauration du festival de La Rochelle, on a revu Hustle (La cité des dangers, 1975). Ce formidable polar sarcastique et triste de Robert Aldrich peut être considéré comme une sorte de "chaînon manquant" (dixit l'ami Erwan Floch'lay) entre le film noir classique et ses avatars post-modernes. [Toutes proportions gardées, certains films policiers de Aldrich et Fuller seraient en effet à ce genre urbain par excellence ce que furent un peu plus tôt les petits westerns Columbia/Ranown de Bud Boetticher et les premiers Peckinpah dans la filiation du western, ultimes rejetons avant l'extinction - avant que les engins motorisés de tout genre (de Two-Lane Blacktop à Mad Max) se substituent aux chevaux.] Le casting Deneuve-Reynolds (la pute et le flic intègre) aurait pu être problématique, il est simplement génial. Hustle est un des derniers très grands films de Big Bob, qui disparaîtra quelques années plus tard. La décennie magique des "seventies" sera alors derrière nous, Hollywood ne sera plus jamais pareil.
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Repéré également (dans la même rubrique des "restaurations de chefs-d'oeuvre méconnus [sic] qui débouleront sur les écrans à la rentrée"), un William Friedkin de 1977 oublié et nettement moins roboratif que le film d'Aldrich. Tourné par un cinéaste qui ne se refuse rien, dans la foulée du triomphe de son Exorcist, Sorcerer/Le convoi de la peur est une nouvelle adaptation du Salaire de la peur de Georges Arnaud - mais pas tout à fait un remake du célèbre film de Clouzot. Ambition démesurée, distribution multinationale (Scheider, Cremer, Rabal, Amidou), tournage interminable dans la jungle (et Jérusalem, Londres et l'avenue Foch pour le prologue), contextualisation parfois ambiguë (l'épisode israélien et ses conséquences sont nettement répugnants)... On s'est franchement ennuyé, rien dans la mise en scène (irréprochable) de Friedkin ni la dramaturgie de son scénariste ne risquant de détourner les quatre salopards de cette horreur de fatum imposé par Arnaud. Chacun sera juge.
Nous avons eu, avec quelques personnes également rencontrées lors de ce beau festival, l'occasion d'échanger sur le cinéma, la réception critique, nos goûts respectifs... et je vous avais fait part de mes réserves sur la contextualisation d'un film, insistant sur les limites de celles-ci puisque l'accueil d'un film ne saurait être réservé à un spectateur cinéphile capable de restituer parfaitement un film dans son contexte!
Cela dit, c'est un plaisir de vous lire comme cela fut très plaisant de vous écouter, quelles que soient nos divergences (notamment sur "Moonfleet" que je vais m'empresser de revoir pour voir si ma déception initiale était infondée).
Au plaisir donc de découvrir sur votre blog le cinéma et d'autres domaines que vous défendez avec conviction...
Un simple amateur du septième art.