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le vieux monde qui n'en finit pas
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16 décembre 2018

Lectures pour tous : Stefan Hertmans

« Il est témoin d’un épouvantable accident du travail : le fils du forgeron tombe tête la première dans le four brûlant. Il voit le forgeron [...] retirer son fils des flammes en jurant, mais il est trop tard. Ce qu’ils aperçoivent est un visage détruit, une boule noircie par le feu, aux traits vaguement humains où bouillonne un liquide glaireux, mélangé à de la salive ensanglantée. Les yeux calcinés sont blancs comme ceux d’un poisson cuit. La bouche est un trou noir où brillent les dents du haut à présent dégagées. Un jeune ouvrier entre, un seau dans les mains, et verse de l’eau sur la tête. Dans le sifflement et le gargouillement asphyxiants que produit l’eau qui s’infiltre en profondeur dans la peau brulée, le jeune homme agonisant expulse un dernier gargarisme, tandis que son corps se tord et se convulse. À l’entrejambe de son pantalon apparaît soudain une tache sombre. Le père se précipite sur son fils, attire à lui la tête méconnaissable, saisit le corps par les épaules sans rien dire. Il reste assis, immobile, pendant plusieurs minutes, marmonnant sans cesse entre ses dents des "nom de Dieu" à peine audibles. Il ne lève pas les yeux, comme s’il voulait pénétrer de son regard les globes oculaires blancs. Les ouvriers et les apprentis observent la scène fixement. »

Stefan Hertmans, Guerre et Térébenthine, 2013, Gallimard « Du monde entier » [2015],
traduit du néerlandais (Belgique) par Isabelle Rosselin

~

oorlog

 

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