« Le japonais est une langue très compliquée, a-t-il dit comme s’il se parlait à lui-même, beaucoup plus compliquée que l’anglais. En particulier parce que le je japonais n’existe pas vraiment, on l’utilise très peu, même entre amis. Il existe bien un je mais on ne l’emploie que dans l’intimité, avec des proches, et ce mot n’existe pas pour les femmes, les femmes n’ont pas à leur disposition cet accès à leur intimité. Et ce qui rend la langue plus complexe encore, c’est qu’il n’y a pas de genre en japonais, il faut toujours être attentif au contexte, à l’atmosphère, au cadre dans lequel on est amené à s’exprimer avant de prendre la parole. Il s’agit de respecter l’harmonie entre les personnes présentes et ce respect s’apprend tous les jours, à l’école, à la maison et au bureau. On doit rester à l’affût, on ne doit pas commettre d’erreur et rompre l’harmonie sociale sous peine d’être ostracisé. C’est pourquoi il est si fatigant, même pour un Japonais, de parler sa propre langue. Olivia Rosenthal, Un singe à ma fenêtre, Gallimard/Verticales, 2022.

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La scolopendre géante (qui hante la narratrice)

Scolopendra_gigantea