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le vieux monde qui n'en finit pas
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7 janvier 2023

Oui, chef

ouichef

« Qu’on offre à quelques individus réduits en esclavage une position privilégiée, certains avantages et de bonnes chances de survie, en exigeant d’eux en contrepartie qu’ils trahissent la solidarité naturelle qui les lie à leurs camarades: il se trouvera toujours quelqu’un pour accepter. Cet individu échappera à la loi commune et deviendra intouchable. Il sera donc d’autant plus haïssable et haï que son pouvoir gagnera en importance. Qu’on lui confie le commandement d’une poignée de malheureux, avec droit de vie et de mort sur eux, et aussitôt il se montrera cruel et tyrannique, parce qu’il comprendra que s’il ne l’était pas assez, on n’aurait pas de mal à trouver quelqu’un pour le remplacer. Il arrivera en outre que, ne pouvant assouvir contre les oppresseurs la haine qu’il a accumulée, il s’en libérera de façon irrationnelle sur les opprimés, et ne s’estimera satisfait que lorsqu’il aura fait payer à ses subordonnés l’affront infligé par ses supérieurs. Nous nous rendons bien compte que tout cela est fort éloigné de la représentation qu’on fait généralement des opprimés, unis sinon dans la résistance, du moins dans le malheur. [...] » Primo Levi, « Les élus et les damnés », Si c’est un homme (1947), traduit de l’italien par Martine Schruoffeneger, Julliard, 1987.

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