« Près de la cabane, frais, reposé, calme, jouissant fort du caractère édénique du site, le cheval de Greene bouffe de l’herbe. Entre les arbres, un filet de fumée monte d’un petit feu dissimulé entre des rochers. À côté du feu, un sac de toile. Au-dessus du feu, accroché à une branche oblique, un lapin qui, lui, ne jouit pas fort du caractère édénique du site, car il est mort, on lui a arraché la peau et les viscères, il cuit. Sa graisse en fondant tombe dans le feu avec de petits sifflements. » L’homme au boulet rouge, novélisation d’un scénario de Barth J. Sussman [The Red Ball Gang],1972, Gallimard.
« Je me suis dit, pourquoi pas ? Les dialogues et la trame sont strictement ceux du scénario, et le texte est systématiquement prolongé par des digressions marxistes tout à fait incongrues. Si je m’étais senti libre de ne pas respecter le texte de Sussman, j’aurais incendié la plantation de coton, je n’aurais pas laissé le propriétaire s’en tirer et faire fortune. » [JPM, propos recueillis par François Guérif et Jean-Pierre Deloux, Polar n°12, juin 1980.]
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J'ai longtemps cru que ce Sussmann (pas que des des glaçons) n'était qu'une fiction, le Vernon Sullivan de Manchette, un peu comme Debord fut toujours persuadé que Manchette lui-même n'était qu'un masque de l'un des frères George (Jean-Pierre ? ou l'autre ?) dont l'IS avait jadis fait grand bruit microcosmique. (À ce sujet, voir la correspondance de Champ Libre).
Mais après avoir poussé les recherches un tantinet, force me fut d'admettre que ce B.J. existait bel et bien, auteur jeunesse apparemment apprécié outre-Atlantique.
Manchette ne fut que son Viénet — mais avec quel panache !