« Vous noterez que cette année-là, il y eut une si grande sécheresse dans tout le pays d’Afrique qu’il se passa 36 mois, trois semaines, quatre jours, treize heures et un peu plus sans pluie, avec un soleil d’une chaleur si véhémente que toute la terre en était asséchée. Même au temps d’Hélie, elle ne fut pas plus brûlante qu’elle l’était alors: il n’y avait plus un arbre sur terre portant feuilles ou fleurs, les herbes avaient perdu leur verdure, les rivières étaient taries, les fontaines à sec, les pauvres poissons, privés de leur élément naturel, erraient et criaient lamentablement sur le sol, les oiseaux chutaient dans l’air faute de rosée, les loups, les renards, les cerfs, les sangliers, les daims, les lièvres, les lapins, les belettes, les fouines, les blaireaux et autres bêtes, on les trouvait dans les champs, mortes, la gueule béante. Quant aux hommes, c’était une grande pitié: vous les auriez vus tirant la langue comme des lévriers qui ont couru six heures ! Plusieurs se jetaient dans les puits. D’autres se mettaient sous le ventre d’une vache pour être à l’ombre – Les Desséchés, comme les appelle Homère. » François Rabelais, Pantagruel, 1532. [in Tout Rabelais, intégrale bilingue, Bouquins, « La Collection », sous la direction de Romain Menini, 2022.]
[merci à Chantal pour la photo]