Alice Diop, cinéaste
« Le 8 juin, j’ai fait un malaise dans le métro. J’avais plus de 17 de tension. Ça ne m’était jamais arrivé avant. Aux urgences, le médecin m’a dit que tout allait bien physiquement, mais que parfois le corps réagissait à une menace invisible qui semblait imminente. Il m’a demandé : « Est-ce qu’il y a quelque chose qui vous inquiète en ce moment ? » J’ai failli lui répondre : « Et vous, tout va bien, il n’y a rien qui vous inquiète ? »
« Une copine m’a parlé d’un documentaire sur Arte, La Jeunesse n’emmerde plus le RN, où les jeunes ne mettent à aucun moment en avant la question identitaire. Une manière de dire que ce n’est plus le moteur du vote à l’extrême droite. Cette question est absente parce que la chose est tellement entendue qu’il n’y a plus besoin de mettre en avant cet argument. Et c’est là le problème. Ça invisibilise le caractère profondément raciste du Rassemblement national, ses effets et le ressenti des gens qui en seront victimes. Je me dis que ça arrange tout le monde de ne pas voir l’éléphant au milieu de la pièce. Le racisme est tellement diffus, tellement partagé, de façon souterraine ou impensée, que c’est comme s’il avait disparu alors que c’est la question centrale. » [Merci Thierry]