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le vieux monde qui n'en finit pas
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8 février 2009

Canicule 5

« Debout à côté de sa machine, et tête nue, la femme à la vespa était d'ordinaire toute vêtue de noir, avec un sac à dos noir lui aussi, et la voilà maintenant qui se penchait sur un autre sac à dos mais qu'elle portait sur le ventre, celui-ci était rouge, il lui faisait une tache vermillon sur le thorax. Il en dépassait la tête d'un chien.

Il en dépassait la tête d'un chien de manière soudain si évidente que semblait rétrospectivement mystérieuse la raison pour laquelle, la première fois qu'elle avait vu la femme, et alors que cette tête n'était ni rouge ni noire mais d'un blanc de phtisique et se détachait donc nettement au-dessus du sac sur le fond du blouson, Olga Leeuwenhoek ne l'avait pas remarquée en même temps que les autres éléments du tableau. C'est à croire qu'une image n'est immédiatement lisible dans tous ses détails qu'à la condition que chacun d'eux offre à la description qui en sera faite toutes les chances d'être elle aussi érigée au rang d'un art, de déployer ses propres richesses, style, rhétorique, trouvailles semantiques. Or, la tête de chien hors du sac à dos ventral rouge produisait le même effet, inaccessible à la description, que Le Chien de Goya ou L'Asperge de Manet. Une fois qu'on a dit Il y a une tête de chien, il y a une asperge, on reste sans voix. »

Catherine Lépront, Disparition d'un chien, Seuil, 2008

Détachement de l'Armée rouge, 1918
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