Lectures pour tous : La révolte des pendus
Diego Rivera: Emiliano Zapata
« Pour le moment, personne ne rentrera chez soi. Personne, de tous les muchachos qui gémissent et souffrent ici, dans les monterias, personne ne rentrera chez lui, aussi longtemps que je serai capable de me tenir sur mes deux jambes! Car nous devons d'abord nous rendre dans les fincas et descendre les finqueros et leurs mayordomos. Ensuite, nous descendrons les policiers, les rurales et les federales qui se mettront en travers de notre route. Il faut que tous les peones deviennent des hommes libres. Tous et tous, compris? Il faut que tous aient leur bout de terrain à eux et qu'ils puissent le cultiver en paix, pour eux et pour personne d'autre! Tierra y Libertad! La terre qui vous appartient, il en faut un lopin pour chacun. Car sans terre, il n'y a pas de liberté, ni pour vous ni pour personne! Et si nous ne commençons pas par nous débarrasser des finqueros, des mayordomos, des rurales, des federales, des gardes, des maires et des chefs politiques, jamais nous ne pourrons obtenir la liberté. Quand ils nous verront arriver, ils ramperont devant nous et nous supplieront. Mais pas de quartier pour eux! Parce que, lorsque vous seriez retournés tranquillement chez vous, alors vous les verriez revenir. Ils se seraient ressaisis et les nouvelles chaînes qu'ils auraient forgées pour vous seraient plus lourdes encore que celles d'aujourd'hui. Il faut tuer son ennemi. Il faut tuer tous ceux qui peuvent devenir des ennemis! En ayant pitié d'eux, vous vous trahiriez vous-mêmes, vous trahiriez vos femmes, vos parents, vos soeurs, vos enfants, et même ceux qui ne sont pas encore nés! »
B. Traven, La révolte des pendus (1936),
La Découverte, « Culte fictions », 2004 (trad. A. Lehman)