Nos films préférés en 2010 - Jean-Pierre Bouyxou
Jean-Pierre Bouyxou
disque vinyle, fin 2010 : la musique des films d'Etienne O'Leary
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De toute ma vie, je n’ai rien vu de plus beau que les courts métrages qui composent le DVD multizone « Etienne O’Leary, Films 1966-1968 », édité à Montréal par l’ICPCE (Institut pour la coordination et la propagation des cinémas exploratoires, [clic]): Day Tripper (1966), Homeo (1967) et Chromo Sud (1968), auxquels s’ajoute, en bonus, un inédit inachevé de 1967 avec les acteurs du Living Theatre. Longtemps invisibles, ignorés des historiens comme des critiques, les films d’Etienne O’Leary sont au cinéma ce que les poèmes les plus fulgurants de Rimbaud furent à la littérature. C’est en travaillant avec O’Leary, dont il était un proche, que Pierre Clémenti a éprouvé le désir de passer lui-même à la réalisation. Mais O’Leary est encore plus lyrique, encore plus novateur, encore plus brûlant que lui. Aucun cinéaste – je dis bien aucun – n’a eu son intensité, sa fulgurance. Ne mourez pas idiot: découvrez-le, ce sera un choc.
Parmi les « vrais » films de l’année, un seul à signaler: Le Masque de la Méduse, de Jean Rollin. Une épure, l’aboutissement de tout le cinéma rollinien. Laissez ricaner les connards et abandonnez-vous au charme indicible d’un réalisateur hors normes. Dernier des grands surréalistes, Rollin est mort le 15 décembre dernier, peu après l’achèvement de cet ultime mélodrame anarcho-fantastique (tourné dans un incroyable dénuement matériel), sans avoir fait la moindre concession aux diktats du conformisme. Il est malheureusement probable que Le Masque de la Méduse ne sortira jamais en salle, mais il figure sur le DVD qui accompagne le tome 1 des œuvres romanesques complètes de son auteur aux éditions E/dite [ clic ! ]. Indispensable.