17 octobre 1961 : Henry nous écrit
L'ami Henry B. m'envoie ce témoignage.
« Aujourd'hui, il y a tout juste 50 ans, le mardi 17 octobre 1961, une grande manifestation était organisée par la Fédération de France du FLN pour s'opposer au couvre-feu imposé en France aux Algériens.
Moi, je me faisais virer du domicile familial au motif que j'avais plus ma place puisque majeur (21 ans à l'époque)...
Et, curieusement, par trois fois, je devais retrouver les manifestants sur mon chemin.
La première fois, au croisement du Boulevard Haussmann et de la rue de Berri justement près du domicile d'un de mes grands pote du PSU, Christian H. – où je devais finalement me réfugier en fin de soirée – des hommes et des femmes à pied qui venaient sans nul doute du bidonville de Nanterre – La Défense n'existait pas encore – et quand Christian leur proposa de venir se réfugier chez lui, ils répondirent non de la tête avec un pâle sourire tout en continuant leur chemin...
La seconde fois, à la sortie justement de l'appartement de ma mère, rue des Fossés-Saint-Jacques et là, ce fut plus clair pour nous: ils étaient en troupeau à courir les mains croisés sur la nuque, harcelés par les cris de policiers en civil avec la mitraillette au côté...
Et, enfin une troisième fois, à la sortie du cinéma le Rex où l'on projetait Les Canons de Navarone avec Gregory Peck, David Niven et Anthony Quinn sur les Grands Boulevards, là, plus personne... mais des grandes flaques de sang sur les trottoirs avec des morceaux de chair épais comme des steaks...
Nous sûmes le lendemain qu'il y avait eu des centaines de morts dont les cadavres avaient été jetés dans la Seine...
Espérons que les Socialistes – qui, sous la conduite de François Mitterrand et de Guy Mollet, furent les instigateurs zélés de cette guerre – auront aujourd'hui un mot de compassion... à défaut d'excuses comme le fit, en son temps, Chirac à l'égard des Juifs.
J'en doute car hier au soir, leur candidat désigné à la présidentielle – François Hollande – a eu l'indécence de citer 1956 comme année de référence pour un succès socialiste à des élections alors qu'elles permirent en fait à Guy Mollet de confier tous les pouvoirs à l'armée en Algérie et a y envoyer le contingent !
Bien affectueusement.
Henry. »