La mort d'Etienne O'Leary, "Lautréamont sous acide"
Étienne O'Leary dans Day Tripper
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Nous avons appris cette nuit la mort d'Étienne O'Leary, des suites d'une septicémie, dans un hôpital de Montréal. Nous ne l'avions redécouvert que très récemment, grâce à la diffusion de ses trois films en DVD. Leur "bande originale" avait fait également l'objet d'une édition en microsillon. Jean-Pierre Bouyxou, dont il fut l'ami depuis le milieu des années soixante, à Paris, s'activait beaucoup pour le faire connaître. Voici ce qu'il écrivait en septembre dernier :
Un Lautréamont sous acide
On l'appelle parfois "Le Rimbaud du cinéma", mais c'est plutôt Lautréamont qu'évoque Étienne O'Leary. Pas seulement parce qu'il a, comme lui, livré toutes ses œuvres entre 22 et 24 ans, mais surtout parce que ses trois seuls courts métrages terminés, Day Tripper (1966), Homeo (1967) et Chromo Sud (1968), ont la même fulgurance hypnotique, le même lyrisme incantatoire, la même rage réfractaire, la même exaltation sombre que les Chants de Maldoror, dont ils sont un peu la version pop, sous acide. Dans l'underground français des années 1960, O'Leary a incarné le psychédélisme plus intensément que quiconque. Aux antipodes du courant contemplatif (façon Philippe Garrel) qui dominait alors, ses films, poèmes visuels sans fil narratif, ne ressemblent à rien que vous ayez déjà vu - pas même aux premières réalisations de Pierre Clémenti qui, pourtant, s'en inspiraient directement. On les crut à la jamais perdus après Mai 68 (dont Chromo Sud montre quelques-unes des rares images en couleur), lorsque leur auteur regagna son Canada natal et se mura dans le silence. Les revoici en DVD, grâce à l'Institut pour la coordination et la propagation des cinémas exploratoires (ICPCE) québecois. Avec, en bonus caché, un inédit sans titre, inachevé, interprété par les comédiens du Living Theatre. À couper le souffle. La beauté, la jeunesse et la révolte à l'état brut. [Diffusion en France: www.choses-vues.com]
Jean-Pierre Bouyxou
Jean-Pierre en a déjà parlé ICI, et il évoqua O'Leary dans son entretien avec Stéphane de Ménildot :