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le vieux monde qui n'en finit pas
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17 avril 2014

« L'élégance et l'infinie politesse d'Ozu » à la Cinémathèque française

Une preuve indéniable de l'arrivée du printemps. La Cinémathèque française organise une large rétrospective des films de Yasujiro Ozu (parrain fondateur de ce blog avec Ravachol, Jean-Luc Godard, Charles Fourier et quelques autres). Les projections et diverses rencontres auront lieu du 23 avril au 26 mai. Toutes informations ICI.

ozu

Extrait d'un texte de présentation de Charles Tesson :

« Dans le monde d'Ozu, les enfants de sexe masculin sont capables de la plus grande violence, filmés comme des petits martiens absolutistes et insolents car leur désir, égoïste et sans limite, n'entend se soumettre à aucun principe de réalité. Jusqu'à ce que les adultes, qui ont appris à s'accommoder de ces limites, aussi injustes soient-elles, ne leur enseignent la règle du jeu qui les attend sur la scène où ils auront à grandir. Faut-il voir dans ce trait d'éducation une soumission et une acceptation à l'ordre du monde, au nom d'un conservatisme évolutif dont les personnages ne seraient pas les acteurs ? Pas sûr, à l'image de Noriko (Setsuko Hara), au sourire d'une gentillesse au bord de la niaiserie, ne disant jamais non au plan concocté par son frère aîné (Chishu Ryu) pour trouver un mari dans Été précoce, avant d'en choisir un autre, contre toute attente (veuf, père d'un enfant). En outre, si l'acception des choses s'appuie sur un cadre sociétal, ressort narratif, elle bascule très vite sur un plan existentiel, à travers le caractère inéluctable de la séparation au cœur de la transmission (élever des enfants qui ensuite se marieront et partiront). La scène de pêche à la ligne d'Il était un père, où l'homme invite son enfant à s'éloigner de lui, résume cet enseignement douloureux et inéluctable. Le rythme soudain non synchrone du mouvement des cannes à pêche manifeste furtivement cet ébranlement du jeune homme devant cette réalité à laquelle il ne s'était pas préparé, avant que leur accord dans leur activité ordinaire ne soit retrouvé.

« Ozu, comme beaucoup de cinéastes de son époque, a été influencé au départ par le cinéma américain. En particulier L'Opinion publique de Chaplin, et plus encore par Marriage Circle de Lubitsch, dont il conservera le goût de l'échange verbal: à chaque prise de parole, son plan et son visage. Ses premiers films mêlent influences burlesques (Ozu a été formé à l'école du "nonsense mono") au cœur d'histoires graves, sur fond de cruauté et d'humiliations, qu'Ozu a su si bien filmer: le père faisant des courbettes devant son patron, l'ancien employé au chômage devenu homme-sandwich. En témoigne la scène de Chœur de Tokyo, drôle en apparence, où l'employé, venu se plaindre du renvoi d'un collègue, se querelle avec son patron à coups d'éventail, avant d'être à son tour licencié, le ton léger et badin utilisé pour filmer la séquence ne laissant rien présager de ses conséquences dramatiques.

« Les films d'Ozu commencent rarement par l'homme pas plus qu'ils ne finissent sur lui, tout comme l'enchainement des séquences, rythmées par un mouvement du dehors au dedans (une usine puis ses bureaux, l'enseigne d'un bar puis son comptoir) et inversement. Outre une inscription du milieu, sur un plan sociétal, au rythme des usages au quotidien, on peut y ressentir la manifestation d'un englobant qui encadre la destinée humaine sur terre, ramenant l'existence à sa juste échelle, bordée par un vivant où la présence humaine a provisoirement déserté les lieux qui en portent encore la trace (une bouteille, du linge sur un fil) ou prolongée par ces images d'un monde heureux de vivre sans que l'homme soit sa raison d'être. Cette élégance avec laquelle chez Ozu on passe du sociétal à l'existentiel (la fin de Printemps tardif, la solitude du père, de l'épluchure de la pomme en insert au plan large sur le bord de mer, l'ouverture d'Été précoce sur ce chien sur la plage qui sort du cadre sans plus jamais donner de nouvelles, l'insert sur la cage à oiseau avant d'accéder au cœur de la maison), montre une réalité qui précède l'entrée en scène de l'homme et subsistera à son passage, en toute sérénité: couloir d'une maison, d'un bureau, d'un salon bordé de cloisons et de panneaux coulissants derrière lesquels les personnages entrent et sortent du champ. Rarement le cadre vertical du plan s'érige en acteur de ces banales transhumances, le décor fragmentant ces trajets. Cette humilité et infinie politesse devant ce que l'homme vit et devient dans le labyrinthe de cette contingence des lieux ordinaires devient chez Ozu la source de la plus profonde émotion, là où la banalité du vivre côtoie la temporalité de toute existence sur terre dans un espace provisoirement rendu visible, le temps d'un passage. »

Charles Tesson

~

rêves perdus (ozu 32)

Films d'Ozu projetés à la Cinémathèque

Gakusei romance: Wakaki hi [Jours de jeunesse] 1929

Wasei kenka tomodachi [Combats amicaux à la japonaise]1929

Daigaku wa deta keredo [J’ai été diplômé,mais...] 1929

Hogaraka ni ayume [Va d’un pas léger] 1930

Rakudai wa shita keredo [J’ai été recalé,mais...] 1930

Sono yo no tsuma [Femme d’une nuit] 1930

Shukujo to hige [La dame et les barbes / La femme et la barbe] 1931

Tokyo no gassho [Le chœur de Tokyo] 1931

Umarete wa mita keredo [Gosses de Tokyo] 1932

Seishun no yume ima izuko [Où sont les rêves de jeunesse ?] 1932

Hijosen no onna [Femmes et voyous] 1933

Dekigokoro [Cœur capricieux] 1933

Tokyo no onna [Une femme de Tokyo] 1933

Haha wo kowazuya [Le galopin / L’amour d’une mère] 1934

Ukigusa monogatari [Histoires d’herbes flottantes] 1934

Tokyo no yado [Une auberge à Tokyo] 1935

Kikugoro no kagamijishi [La danse du lion] 1935

Hitori musuko [Le fils unique] 1936

Shukujo wa nani o wasureta ka [Qu’est-ce que la dame a oublié ?] 1937

Todake no kyodai [Les frères et sœurs Toda] 1941

Chichi ariki [Il était un père] 1942

Nagaya shinshiroku [Récit d’un propriétaire] 1947

Kaze no naka no mendori [Une poule dans le vent] 1948

Banshun [Printemps tardif / Fin de printemps] 1949

Munakata shimai [Les sœurs Munakata] 1950

Bakushu [Eté précoce] 1952

Ochazuke no aji [Le goût du riz au thé vert] 1952

Tokyo monogatari [Premier voyage à Tokyo] 1953

Soshun [Printemps précoce] 1956

Tokyo boshoku [Crépuscule à Tokyo] 1957

Higanbana [Fleurs d'équinoxe] 1958

Ohayo [Bonjour] 1959

Ukigusa [Herbes flottantes] 1959

Akibiyori [Fin d’automne] 1960

Kohayagawake no aki [L’automne de la famille Kohayagawa / Dernier caprice] 1961

Sanma no aji [Le goût du saké] 1962

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