Le temps du vin nouveau, ou bourru
« J’ai voyagé. J’ai été dans l’Inde, j’ai parcouru les Gaules. J’ai traversé le désert où l’on a soif. Les pays esclaves, je les délivrais; les pays inhabités, je les peuplais; et plus je vieillissais, plus s’accroissait ma force: je tuais mes amis en jouant avec eux, je rompais les sièges en m’asseyant dessus, je démolissais les temples en passant sous leurs portiques. J’avais en moi une fureur continuelle qui débordait à gros bouillons, comme le vin nouveau qui fait sauter la bonde des cuves. »
Gustave Flaubert, La Tentation de saint Antoine, 1874.
Flaubert avait longuement crapahuté au nord de la Loire. Il n'ignorait pas que le vin nouveau, dans quelques provinces, est baptisé bourru. Dans le pays nantais, région de gros plant et de muscadet, aujourd'hui, c'est la pleine saison. Elle est brève (dix, douze jours), profitons-en. Avec Boris, Lettre à mes amis restés en Belgique, en embuscade.