A Bruxelles, le prix de l'Age d'Or revient par la grande porte
Enfin séparé du programme plus consensuel de Cinédécouvertes (primes à la distribution en Belgique), le prix de l'Age d'Or en sa nouvelle mouture se déploie cette semaine sur les écrans de la Cinémathèque royale de Belgique (ou, dans l'inepte jargon du service publicitaire de cette vénérable institution, Cinematek).
C'est, quarante ans plus tard,
EXPRMNTL (1949-1958-1963-1967-1974) de Jacques Ledoux
qui renaît de ses cendres.
Les trois capitaines de ce galion pirate* flambant neuf,
Olivier Dekegel, Ph!l Delvosalle et Xavier Garcia Bardon,
définissent le cap qu'ils se sont fixé pour cette première croisière :
[* corsaire, pour être précis. Même si le navire nous rapporte tant de trésors inouïs,
il est indubitable en effet que la Cinémathèque bat pavillon royal.]
Ca y est ! CINEMATEK propose enfin - selon une formule radicalement repensée - le retour promis de L’Âge d’or, la manifestation imaginée par Jacques Ledoux pour soutenir les films poétiques et subversifs, qui, en écho au film de Buñuel de 1930, rompaient à la fois avec les conformismes du cinéma et ceux de la société. Et le prix de L’Âge d’or mute une fois de plus, pour s’adapter au paysage cinématographique qui l’entoure: il devient un véritable festival, doté d’une programmation riche et audacieuse.
Détaché des Cinédécouvertes, L’Âge d’or renoue avec l’esprit de recherche et d’audace d’une autre manifestation phare de l’histoire de la Cinémathèque royale: le festival EXPRMNTL, au sein duquel les premiers prix de L’Âge d’or avaient d’ailleurs été décernés. Vingt-trois films récents et jamais montrés à Bruxelles - sans distinction de durée (trois minutes ou trois heures), de technique ou de format (pellicule ou vidéo) - participent à la compétition (€ 5.000). Par ailleurs, le festival recevra la visite d’invités tels que Birgit Hein (présidente du jury), Gustav Deutsch (pour son dernier film Shirley, sa trilogie fondatrice Film ist. et une masterclass) ou encore Mark Webber (qui vient de compiler les écrits de Gregory Markopoulos), mais aussi Friedl vom Gröller, Matthias Müller, Christoph Girardet, Robert Todd et John Smith… Sans oublier une sélection de films plus anciens à redécouvrir en belles copies (Markopoulos mais aussi l’avant-garde italienne, un double volet de "poèmes ethnographiques" ou encore la restauration d’un western signé Adolfas Mekas).
Le "nouvel Âge d’or" propose un espace où les frontières cinématographiques (entre le cinéma expérimental, les fictions décalées, les documentaires singuliers) sont enjambées et court-circuitées plutôt qu’acceptées et soulignées. Un festival de cinéma qui vibre par la foi qu’il a dans l’aura des images, dans la puissance de leur montage ou dans la juste durée de leurs plans, dans la force du son… ou du silence. Un festival d’expériences cinématographiques, pour les cinéastes et pour le public.
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CHRISTOPH GIRARDET & MATTHIAS MÜLLER
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