Nantes : Jean-Jacques Reboux poursuivi pour « injures publiques »

Communiqué de Jean-Jacques Reboux
écrivain poursuivi pour  « injures publiques »
par Brigitte Lamy, procureur de la République de Nantes

Alors que l’écrivain italien Erri De Luca, poursuivi pour "incitation au sabotage" de la ligne TGV Lyon-Turin, vient d’être relaxé par la justice italienne, c’est au tour d’un écrivain français d’être poursuivi dans le cadre d’une affaire présentant d’importants enjeux écologiques; en l’occurrence la lutte contre l’aéroport Notre-Dame-des-Landes et son corollaire les violences policières, alors même que le droit à manifester est remis en cause en France et que la vérité officielle sur la mort de Rémi Fraisse a été mise à mal par une contre-enquête indépendante des services de police et de gendarmerie.

Brigitte Lamy, procureur de la République de Nantes, me poursuit pour "injures publiques", pour avoir commenté sur mon blog sa décision de classer sans suite les plaintes de six personnes victimes de violences policières lors de la manifestation nantaise contre l’aéroport Notre-Dame-des-Landes du 22 février 2014, au cours de laquelle trois manifestants ont été blessés à l’œil par des tirs de LBD 40 (lanceur de balles de défense), le plus gravement atteint étant Quentin Torselli, 30 ans, qui a perdu l'œil gauche et vit depuis avec une prothèse oculaire.

Malgré une enquête confiée à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), et de nombreuses vidéos accablantes pour la police, prouvant notamment que Quentin Torselli se tenait à l’écart des manifestants "violents", le 7 avril 2015, Brigitte Lamy classait les six plaintes sans suite, considérant: "Nous ne disposons pas d’éléments suffisants pour caractériser une infraction."

Après avoir porté plainte contre le site Nantes Révoltée pour avoir reproduit une affiche placardée sur les murs de Nantes la représentant les mains souillées de sang, Mme Lamy me poursuit à mon tour, la totalité de mon billet d’humeur étant considérée comme injurieuse, selon l’assignation.

L’article incriminé est ICI  

Lors de mon audition par la PJ de Nantes, j’ai déclaré de ne pas avoir eu l’intention d’injurier Mme Lamy, ni, a fortiori, de la moindre volonté de porter atteinte à l’autorité judiciaire.

J’ai affirmé en outre avoir écrit ce billet d’humeur dans un réflexe épidermique, en solidarité avec les victimes et leurs familles, notamment celle de Quentin Torselli, que je connais bien, et dans un style volontiers satirique.

Le compte rendu complet d’audition du suspect est ICI

L’affaire a été dépaysée devant le parquet de Saint-Nazaire.

On lira avec intérêt la lettre ouverte que le journaliste nantais Eric Chalmel a envoyée à Brigitte Lamy, la suppliant, en quelque sorte, de retirer sa plainte, sous peine de se couvrir de ridicule. (Et, pourrait-on ajouter, de relancer un débat sur les violences policières qu’elle a souhaité, dans un premier temps, censurer, en classant les plaintes des victimes.) C'est ICI

Jean-Jacques REBOUX, écrivain,
cofondateur du CODEDO (Collectif pour une dépénalisation du délit d’outrage)