Lectures pour tous : Gilles Sebhan
En attendant la sortie, dans quelques semaines, d'un nouveau livre de Gilles Sebhan:
Retour à Duvert, Le Dilettante, 224 p., 20 €.
« À propos d’arbres, prunus serrulata (cerisier du Japon) et prunus dulcis (amandier), Stéphane écrit dans un texte de son mémoire pour l’école: Un jour je me promenais à Watermael-Boitsfort, parmi les petites maisons ouvrières en brique peintes en vert, construites au début du siècle. Sur les trottoirs il y avait des cerisiers du Japon, et chaque année, des bancs de Japonais venaient les admirer, et prendre beaucoup de photos, avec leurs petits appareils, et leurs petits doigts – les doigts noueux qui vous excitent pareils aux anguilles qui se faufilent entre les mains des Espagnols. Cela m’amusait de les regarder, quand, soudain, un couple de Japonais et leurs enfants, m’apercevant, me demandèrent de poser pour eux, avec la fille aînée, au pied des cerisiers. Je fus très étonné, mais j’acceptai. Ils prirent une douzaine de photos, avec de nombreux sourires. Les trois filles et les deux fils, tous y passèrent. Puis ils me remercièrent très poliment. Depuis ces photos, je leur rends hommage en choisissant des photos de livres pornos "made in Japan"... Je n’ai pas fini de leur rendre hommage, en dessinant des culs japonais. Peut-être que je n’aurais jamais dû voir les cerisiers du Japon... »
Gilles Sebhan, Mandelbaum ou le rêve d’Auschwitz, Les Impressions nouvelles, Bruxelles, 2014.
[(note de l’éditeur) Stéphane Mandelbaum, peintre né à Bruxelles en 1961, est assassiné à la fin de 1986 par ses complices, après le vol d’un Modigliani. Son corps sera retrouvé, défiguré par l’acide, à demi caché dans un terrain vague de la banlieue de Namur. Le jeune peintre, dessinateur prodige, personnage charismatique et déroutant, laisse une œuvre où s’enchevêtrent les thèmes violents : portraits de nazis ou d’artistes à la vie brève, scènes pornographiques, inscriptions provocantes. Pasolini, Bacon, Rimbaud ou Pierre Goldman, autant de vies violentes qui semblent annoncer la mort tragique du peintre.]