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19 juin 2019

Une critique de film : « Porte sans clef », de Pascale Bodet

~
Frappez et entrez
Porte sans clef de Pascale Bodet (par Emile Breton)
[Le film est visible sur quelques écrans de France depuis le 19 juin]

 

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« C’est l’histoire de… Non, ce n’est pas une histoire. C’est un portrait. Celui d’un appartement parisien, fenêtre sur rue, fenêtre sur cour. Un extérieur. Un intérieur et ses occupants. Deux permanents: la locataire (ou propriétaire ?), un gymnaste qui fait ses gammes corporelles dès le matin, et des intermittents. Ils frappent à la porte, on va leur ouvrir. Ils s’installent, se lancent dans de grands discours sur le cours du monde, parlent chiffons, sens de la vie. Ou se taisent, passent et s’en vont. Certains dorment là dans des lits, par terre sous des couvertures. Beaucoup de couvertures dans ce film. Ainsi se croisent des vies, se nouent des amours ou des querelles. Querelles parfois violentes, un sac à main de femme faisant fonction de casse-tête sur un punching-ball masculin. Soit la vie d’un petit groupe de quadragénaires pas vraiment sortis de l’adolescence, sous l’œil d’une caméra cruelle et féroce, qui sait prendre la distance d’un humour jamais surligné.

« On l’aura compris, on aime beaucoup ce film. Peut-être parce que c’est un film « primitif ». Et qu’on ne prenne pas ça pour une critique. Bien au contraire. On dit cela d’un temps où le cinéma s’inventait, filmant frontalement des acteurs, où l’on passait d’une scène à l’autre sans trop se soucier de liaisons. Et un film d’amateurs: les acteurs et techniciens sont des amis. Les acteurs parfois sont aussi techniciens. Et la réalisatrice est aussi locataire (ou propriétaire ?) de l’appartement. Et actrice. Tous, manifestement, s’amusent bien, à jouer aux « pros ». Qu’ils sont, en fait. Car tout est cohérent ici, et pas de discours extérieur à ce qui est montré. Ainsi, côté rue, la fenêtre découvre, dès le premier plan, un camp de migrants. Pas la leçon attendue, ils sont là et voilà. Là, comme l’appartement avec ses occupants tout à leurs petites affaires, à leurs envolées sur le sens de la vie. Ils voient ce camp, de cette fenêtre. Ouvrons l’œil pourtant: dans un autre plan, l’actrice-réalisatrice apprend à un enfant noir à réciter un texte où il est question de « se mettre à la place de l’autre ». Puis, au cas où l’on aurait oublié cette très brève scène, un peu plus tard, un autre occupant fera répéter à l’enfant noir une autre leçon.

« Et si cette porte allégorique du titre désignait le film même et la clef, celle dont n’aurait pas besoin le spectateur ? Il frappe et on le fait entrer. Voilà du cinéma. Pas du prêt-à-porter, prêt-à-penser. On lui souhaite le public intelligent qu’il mérite. »

Emile Breton, L'Humanité

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