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5 octobre 2020

La cancel culture, qu'est-ce donc ?

La cancel culture, qu'est-ce ? Aujourd'hui, André Racicot d'Ottawa, dont l'érudition nous épastrouille plus souvent qu'à son tour, fournit quelques éléments d'explication non exempts d'une saine colère, et en propose des traductions. M. Racicot (blog) est linguiste.

~

« On n’osait pas en parler, mais le phénomène a pris tellement d’ampleur qu’il est maintenant impossible pour les médias de l’ignorer, comme ils l’ont fait pendant des années.

La cancel culture sévit depuis un bon bout de temps sur les campus américains. Elle est le fait d’un groupe d’individus extrémistes, supposément progressistes, convaincus de posséder la vérité et qui ne tolèrent aucune contradiction. Ils sont souvent très agressifs et harcèlent tous leurs contradicteurs dans le but de les faire taire une fois pour toutes.

Cette nouvelle orthodoxie, qui déferle au Canada et ailleurs dans le monde, embrasse des causes souvent très louables, comme l’écologie, le véganisme, le féminisme, l’antiracisme, etc. Mais elle tend à les radicaliser et à supprimer toute nuance dans le débat public.

L’expression se traduit assez mal. Comme on peut le deviner, l’anglicisme a la cote dans les médias français et même ici au Canada. Les traductions comme culture de la cancellation (sic), culture de l’annulation ne sont guère inspirantes.

La cancel culture conduit au bannissement, à l’élimination de certains groupes ou individus. Ils sont expulsés du débat public, dès qu’ils osent parler, des hordes de militants intraitables les harcèlent pour les empêcher de parler. C’est pourquoi on pourrait parler de culture du bannissement, de l’anéantissement, de l’annihilation.

Des lectrices me suggèrent culture-bâillon, culture-boycott.

Les médias ont toujours été frileux dans la critique de groupes extrémistes soi-disant progressistes. La culture du bannissement existe depuis un certain temps au Québec, mais les journalistes en ont parlé très peu, probablement pour ne pas avoir l’air de s’attaquer à une frange de la gauche et surtout pour ne pas être traités de réactionnaires.

Voilà de cela plusieurs années, l’ancien premier ministre Jean Charest devait prononcer une conférence à l’Université de Montréal sur l’éthique. Bien sûr, on peut sourire en lisant cela, mais toujours est-il qu’un groupe d’étudiants l’a chahuté au point de l’empêcher de parler. Troublant.

Peu de gens le savent, mais l’Algérienne d’origine Djemila ben Habib a été poursuivie devant les tribunaux pour qu’elle cesse de dénoncer l’islamisme politique au Québec. Heureusement, le tribunal a rejeté cette poursuite-bâillon. Mais le but était clair : l’évincer du discours public.

Plus récemment, la professeure Catherine Russell de l’Université Concordia qui a évoqué le livre de Pierre Vallières Nègres blancs d’Amérique dans un cours, sans même chercher à le défendre ; juste en parler. Le simple fait d’avoir prononcé le mot nègre à deux reprises lui a valu une rebuffade d’un groupe d’étudiants qui l’accusaient de "violence anti-noire" (sic). Il faut lire l’article d’Isabelle Hachey dans La Presse.

La pauvre enseignante a présenté des excuses, mais pour les maoïstes de la rectitude politique, cela ne suffisait pas et ils exigeaient rien de moins que son renvoi ! Anéantir quelqu’un, c’est exactement cela.

C’est pourquoi je pense que des traductions comme culture de l’anéantissement, culture du bannissement sont parfaitement justifiées. »

(André Racicot, 5 octobre 2020)

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