Lectures pour tous : Jonathan Ames
Jonathan Ames (1964- )
« Il tirait sur sa cigarette. Lou Shelton en fumait deux paquets par jour depuis l’âge de quinze ans. Il avait été opéré à cœur ouvert trois fois, et il avait plus de stents dans les artères que de doigts à ses deux mains. Quant à son taux de monoxyde de carbone, il était au même niveau que celui de la ville de Pékin. Il avait survécu au cancer de la bouche, au cancer de la gorge et au cancer de la langue; quant à sa voix, elle oscillait entre le grincement, le sifflement et le dernier râle avant la mort. Un jour, je l’ai vu torse nu; il avait une énorme cicatrice, un gros bourrelet qui allait du haut en bas de sa poitrine. C’était devenu comme une fermeture à glissière qu’on n’arrêtait pas d’ouvrir et de fermer, et à force de passer son temps à entrer et sortir de l’hôpital, il avait fini par choper un staphylocoque doré qui lui donnait des furoncles aux fesses qu’il fallait tout le temps percer. Et il tirait sur sa Pall Mall. »
Jonathan Ames, Il s’appelait Doll, 2021, traduit de l’anglais par Lazare Bitoun, Joëlle Losfeld éditions [2024].