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5 avril 2013

25 ans de subversion carabinée (3b) : René Crevel

Nous célébrons le vingt-cinquième anniversaire de l’Anthologie de la subversion carabinée de notre cher Noël Godin. Pendant vingt-cinq semaines, des auteurs choisis au hasard dans le sommaire du livre sont ici proposés, avec un ou deux extraits pris au hasard dans le chapitre à chacun consacré. L’exercice est gratuit, paresseux et purement incitatif. Pour le reste, démerdez-vous. Réimprimée plusieurs fois, l’Anthologie est encore en vente libre (éditions de l’Âge d’homme), grâce à elle c’est Noël tous les matins. Achetez-la, volez-la, donnez-la ou partagez-la, mais lisez-la.

Aujourd’hui : René Crevel (1900-1935)

rené crevel

« Tandis que la pointolle se vulcanise la baudruche » (1934)

« Dialectique de la putréfaction: ce qui est carié jusqu’à la pulpe de la moelle a revêtu sa plus impitoyable carapace d’artériosclérose. Des cascades de glouglous se répercutent, se répondent, se confondent en échos informes à l’angle obtus des crânes que la hargne a blindés, reblindés, surblindés. Les viscosités à sourires de provocation nationale ne se résignent point à tourner en eau de boudin. La bourgeoisie sue la peur. Or, une goutte de peur c’est un océan de férocité. Ce qu’il y a de plus caduc, de plus sournois, de plus taré se fait chien de grande chiennerie. Et certes non pour se contenter de montrer les dents. À même les gencives de la décrépitude, les râteliers rêvent tout haut de morsures à l’emporte-pièce. Les exploiteurs et leurs valets cherchent par quels moyens retarder et ensanglanter le bond en avant, la Révolution qui doit mettre le prolétariat et, avec le prolétariat, l’humanité tout entière dans le juste chemin de son devenir. [...] Du nombril qui lui sert d’oreille, chaque bedaine a décidé de se faire ventriloque. La grande presse amplifie cette jolie musique intérieure. Dans les quartiers de résidence, il n’est pas un immeuble à gros loyer qui n’offre gracieusement son éléphantiasis en miroir à la bouffissure capitaliste. Et cette bouffissure au minois de poisson-scie, elle a réussi le paradoxal miracle d’être à la fois molle et pointue, si pointue, si molle qu’elle mérite d’être à jamais baptisée "pointolle". [...] La pointolle n’arrête pas de se vulcaniser la baudruche. Elle a du bien au soleil et phlegmons sur rue. Et quels phlegmons, des blocs de phlegmons, hauts, larges, épais, si hauts, si larges, si épais que toute l’ouate, tout le taffetas gommé, tout le crêpe velpeau des officines à hypocrisie ne suffiraient à panser une seule de ces façades que boursouflent le délétère et le nauséabond. Elles finiront bien par crever, les somptueuses ordures en peau de maison, ces gangrènes gazeuses, ces montgolfières des lèpres effervescentes dont le troupeau enfle, les pieds pris à la glu du macadam. Elles crèveront comme crèvera la pointolle et tout ce qui la champignonne et la maquereaute. En attendant la pointolle sabre et goupillonne, mieux que de plus belle. » [Les Pieds dans le plat, Jean-Jacques Pauvert, 1974]

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